La mer en débat : contribution continue FNE NA

Contribution de FNE NA dans le cadre de la concertation continue «La mer en débat» - 12 avril 2025

1) De manière générale, FNE NA demande aux maîtres d’ouvrage, avant de finaliser le projet de DSF qui sera soumis à la consultation publique, de remédier aux insuffisances et lacunes constatées par l’Autorité environnementale, et de suivre les recommandations formulées par le CNPN dans son auto-saisine du 19/03/2025. Il s’agit en effet de lever les manques, interrogations ou incohérences notées pour la façade SA.

Entre autres insuffisances, FNE NA souhaite que le DSF envisage des mesures opérationnelles afin de mieux protéger la mégafaune marine mobile (mammifères marins, tortues), les chiroptères encore mal connus.

2) FNE NA déplore toujours que les perspectives de protection (consolidation et renforcement du réseau des aires marines protégées, identification de zones de protection forte) ne bénéficient pas du même niveau de réflexion que celui déployé pour le développement des activités, notamment l’éolien en mer.

Il en résulte une très grande difficulté pour le public et les usagers du milieu marin de réellement comprendre et suivre une stratégie opérationnelle en la matière, précisant les bénéfices attendus et les évolutions souhaitables du droit pour les zones considérées, la réelle compatibilité de l’évolution des usages avec la stratégie de protection.

Ceci tend à décrédibiliser la notion de développement durable des activités, et ne permet pas d’appliquer la séquence ERC avec efficacité, en particulier pour Eviter en respectant les impératifs de protection et Compenser le cas échéant.

3) FNE NA regrette que la planification proposée n’intègre pas les projets conséquents de réseaux de transport d’électricité : celui reliant la France à l’Espagne et le projet GILA portés par RTE, celui prévu par le consortium XLINKS entre le Maroc et le Royaume Uni alors même que leur installation, leur entretien leur démantèlement le cas échéant, interfèrent fortement avec les écosystèmes, et les activités maritimes. FNF NA demande que les recommandations de la CNDP formulées dans le cadre des débats publics sur ces projets soient suivies.

Cette planification au coup par coup démontre l’urgence de renforcer et consolider la protection des écosystèmes marins, de telle manière que les usages actuels et futurs puissent réellement dès la conception des projets, intégrer leur sauvegarde dans toute perspective d’évolution et de développement.

4) FNE NA réitère sa demande d’instaurer un cadre de gouvernance adapté pour associer plus étroitement la société civile à la planification stratégique de la protection des milieux marins (AMP et ZPF) avec la mise en place de groupes de concertation à l’instar et dans le prolongement des groupes de travail dédiés à l’éolien en mer, à une échelle adaptée à la configuration de la façade sud atlantique. Ces groupes de travail doivent permettre d’affiner nos propositions exposées ci-après en lien avec les acteurs institutionnels et économiques et associatifs. Cette demande a été relayée par la CNDP dans son rapport final pour « La mer en débat ».

5) Pour la protection des écosystèmes marins de la façade Sud Atlantique, FNE NA demande de compléter les propositions envisagées dans le projet de DSF :

• de respecter les objectifs nationaux identifiés dans la stratégie nationale aires protégées 2020-2030. C’est-à-dire : protéger avec une protection forte, au moins 10 % des espaces nationaux sous juridiction, avec des aires marines protégées robustes et en cohérence, une réduction des pressions défavorables.
• de respecter le cadre donné par l’Union européenne de prévoir une protection stricte pour au moins un tiers de ces zones (soit 10 % des mers). La protection stricte concerne des aires intégralement protégées (catégories I et II de l’UICN), laissant les processus naturels non perturbés par les pressions humaines et les menaces.

6) A cette fin FNE NA demande de prendre en compte de manière plus ambitieuse les enjeux de la façade identifiés comme majeurs par les experts.

En effet, les propositions figurant dans le projet de DSF représentent déjà une avancée avec une superficie notée pour l’autorité environnementale de l’ordre de 5,5% de l’espace marin, Toutefois, ceci est encore insuffisant au regard des enjeux considérés comme prioritaires (éléments des écosystèmes marins ou de leur fonctionnement au sein de la façade ou d’un secteur pour lesquels l’atteinte ou le maintien du bon état est prioritaire, en l’état des connaissances actuelles, au regard de la représentativité de la façade pour cet enjeu, de sa sensibilité et de son importance fonctionnelle) (Voir en annexe) .

Il est donc nécessaire de compléter les propositions figurant dans le projet de DSF pour les Zones de protection forte et plus largement pour les Aires marines protégées.

Lors du débat public, FNE NA a identifié globalement les sites méritant une protection forte :

• Le Plateau de Rochebonne
• Le Dôme du Golfe de Gascogne
• Le Haut plateau landais de vase bathyale fréquenté par les grands cétacés
• Les écosystèmes marins vulnérables des canyons vaseux : Cap Ferret et Arcachon
• Les grottes sous-marines pour la côte basque
• Le gouf de Cap Breton
• Les habitats remarquables des Pockmarks
• Tous les estuaires entre autres pour les poissons migrateurs
• Et plus largement les eaux côtières, compte tenu de l’importance des habitats fonctionnels : bande des 3 milles.

En s’appuyant sur les références bibliographiques et les avis précités, FNE NA propose que soient étudiées les propositions de ZPF figurant sur la carte schématique ci-après.

Ces propositions sont classées en Zones Potentielles (ZP) si les sites sont inclus dans une aire marine protégée existante (AMP), et en Zone d’Intérêt (ZI) si elles ne sont pas situées dans une AMP.

➔ Au large :

A – Plateau de Rochebonne (ZP) : périmètre à revoir afin de tenir compte de l’avis de NE17 exprimé lors de la récente consultation publique sur l’évolution du périmètre

B1 et B2 - Mer des Pertuis et Estuaire Gironde : Vases subtidales et intertidales Sud Gascogne (ZP si déjà dans AMP et ZI ailleurs)

C - Grande vasière : Vases circa-littorales à pennatules

E - Ecosystèmes marins vulnérables du Talus continental (Voir cartographie ci-après).

➔ Pour la Bande littorale :

D - Bande des 3 milles (ZP si déjà dans AMP et ZI ailleurs) : intégralité de la bande à terme compte tenu des enjeux de nourriceries et frayères pour les espèces amphihalines et multiples espèces poissons, oiseaux, céphalopodes…

Ce secteur tracé de manière « simpliste » sur la carte, nécessite une cartographie beaucoup plus fine avec une approche territoriale ciblée et une analyse détaillée, afin d’intégrer une cohérence de protection Terre/Mer, la prise en compte des habitats et zones fonctionnelles spécifiques.

Voir contribution de la SEPANSO et de Cistude Nature pour plus de détail pour la bande littorale Gironde, Landes, Pyrénées Atlantiques.

Ces propositions méritent d’être affinées à une échelle plus fine notamment pour la bande côtière de la Mer des Pertuis, l’Estuaire de la Gironde, la côte Landaise et le Pays Basque.

7) FNE NA demande que les ZPF ne soient pas envisagées « à droit constant » (comme le suggère l’AE), mais que soient précisées les mesures nécessaires garantissant la protection effective : d’une part pour renforcer la protection dans le réseau d’AMP existant (suppression des techniques de pêche destructrices notamment) ainsi que celles qui peuvent et doivent être envisagées dans les futures ZPF en cohérence avec les enjeux.

Il sera pertinent de prévoir également une coordination :

• avec l’ensemble des façades Nord Atlantique et Manche Est Mer du Nord (pour un réseau représentatif et prise en compte des habitats et cycles de vie des espèces mobiles et migratrices)
• entre la France et l’Espagne (sud de la façade) afin de renforcer la cohérence du réseau envisagé.

8) Au-delà et en complément de la planification du renforcement des AMP et de l’étude de ZPF, FNE NA demande une vigilance extrême pour une protection active fondée sur le respect de la séquence Eviter Réduire Compenser à commencer par Eviter et Réduire les impacts des activités, en notant bien qu’à ce jour, les compensations en mer sont impossibles. Ceci mérite donc une réflexion approfondie accompagnée d’une ambition volontariste de restauration des écosystèmes dégradés.

Tout ceci nécessite un travail spécifique de concertation plus approfondi au sein de groupes de travail locaux associant experts et acteurs du milieu marin.

Annexe

Quelques références clefs pour identifier les enjeux majeurs justifiant d’une protection forte :

- Identification et hiérarchisation des enjeux écologiques des façades maritimes métropolitaines (OFB 2024) : https://www.natura2000.fr/documentation/references-bibliographiques/identification-hierarchisation-enjeux-ecologiques-facades

- Synthèse bibliographique Vasières PNM EGPC : https://plan-gestion.parc-marin-gironde-pertuis.fr/drupal/sites/default/files/2022-08/Synthese_bibliographique_vasieres_subtidales_IBL_2022.pdf

- Avis NE 17 sur Plateau Rochebonne : Reprendre cercle sur carte consultation : https://www.consultations-publiques.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=article&id_article=3127

- Base de données Ecosystèmes marins vulnérables : https://data.ofb.fr/catalogue/srv/api/records/8c7638fd-b548-4f17-b42d-ccf16e9fca74

- Données de base pour la création de ZNIEFF marines et de l’extension du réseau Natura 2000 en mer (Muséum d’histoire naturelle).

Contribution en version pdf