Bertrand Garreau
Mon amour de la nature est né du hasard : la découverte dans une vieille malle, à côté des bandes dessinées de Bibi Fricotin et des Pieds nickelés, de deux livres d’auteurs du XIXème siècle, l’un « La vie des insectes » de J.H.Fabre, l’autre « Les oiseaux utiles » de H. de la Blanchère. Leur lecture m’enchanta et fit naître en moi une passion pour la vie sauvage et en particulier pour les oiseaux.
Le livre de Jean Dorst « Avant que nature meure » fut une seconde révélation. Les menaces sur la nature qu’il décrivait trouvèrent leur illustration dans le remembrement de ma Bretagne natale. La vue de troncs entiers de chênes mis en tas et brûlés fut pour moi un véritable traumatisme.
Puis commença un engagement associatif en Bretagne, en Alsace, ensuite en Gironde quelques brèves années avant d’être entraîné dans la vie professionnelle et familiale. Attiré par le côté associatif et l’action locale concrète, j’ai renoué avec la SEPANSO Gironde à ma retraite. Ma formation forestière initiale et mes fonctions d’ingénieur de l’agriculture et de l’environnement dans la fonction publique trouvent maintenant leur prolongement dans la thématique générale de l’aménagement du territoire, et m’ont conduit à accepter d’être référent « agriculture » au sein de FNE-NA.
Il me semble que les destructions directes, à grande échelle, de la nature dans notre région sont du passé : les grands défrichements agricoles, l’arrachage des haies lors des remembrements, les assèchements de marais ne sont plus guère d’actualité. Au contraire, un mouvement inverse se dessine. De même, un frein au mitage urbain -mais pas de l’expansion urbaine- s’observe du fait d’une planification mieux cadrée.
Les menaces qui pèsent sur les milieux agricoles, forestiers ou naturels me paraissent plus insidieuses qu’autrefois, et surtout elles sont aujourd’hui le fait de phénomènes qui s’opèrent à l’échelle mondiale et sur lesquels notre pays n’a pas un poids significatif : changement climatique, introduction des espèces invasives et de parasites exotiques, expansion du modèle économique de l’occident…
Face à ces bouleversements mondiaux, on peut cependant chercher à avoir une attitude exemplaire dans la gestion de nos territoires. Notre agriculture a largement contribué -et continue de contribuer- à la dégradation de la nature. Elle en est maintenant victime et doit s’adapter. Les choix qu’elles commencent à opérer seront cruciaux pour l’environnement. Ils sont déjà source de désaccords par exemple concernant la gestion de la ressource en eau.
Il me semble qu’une l’agriculture bien pensée et la protection de la nature devraient faire cause commune. Pour régler ou prévenir les conflits, le dialogue avec les organisations agricoles est le premier levier à utiliser, et j’espère qu’il pourra se nouer ou se poursuivre de façon pragmatique.
Bertrand Garreau, Administrateur suppléant de FNE NA, Administrateur de la SEPANSO, Référent agriculture et représentant de FNE NA à la commission régionale de la forêt et du Bois.
Propos recueillis en novembre 2019.